– Ma famille (Hortense) n'a pas été directement touchée par les camps. Personne n'est mort là-bas si bien que je n'ai pas personnellement souffert du fait d'être juif. Ma famille était tout à fait assimilée, comme on dit. Il n'y avait pas de tabou particulier à la maison sur ce sujet. C'est plutôt politiquement que j'ai abordé tout cela lorsque j'ai finalement compris que le monde d'agglutinés où nous sommes était directement issu d'Auschwitz, et Hiroshima également. Le monde où nous vivons fonctionne comme les camps, dans la même fragmentation et le même refus de la responsabilité.
– Mais les gens ne sont pas déportés Samuel, ils ne sont pas transformés en abat-jour, en savons, on ne peut pas dire ça.
– Ils ne sont pas déportés, non, ils ne sont pas transformés en savons mais sont devenus des marchandises plus ou moins rentables. L'ensemble du système fonctionne sur un rapport de rentabilité comme les camps. C'est là l'inconscient de notre monde. Cette industrialisation de la mort est un point de non-retour sur lequel s'est greffé l'industrialisation de la vie. A Auschwitz ils ont fabriqué des cadavres, ils ont supprimé la vie dans la mort, si bien qu'aujourd'hui c'est la mort elle-même qui est niée dans la vie et en même temps qu'elle est la vie dans la vie. C'est pourtant clair. A Auschwitz ils ont organisé, ils ont organisé le meurtre du langage et maintenant nous subissons le bruit assourdissant de la communication planétaire qui tend à nous faire oublier ce meurtre. Les mots ne portent plus leur sens. Les individus ne se parlent plus parce que le sens des mots a été contaminé à Auschwitz. Ce qui avait tenu de valeur aux individus jusqu'à Auschwitz a été anéanti là-bas.
– Ils ne sont pas déportés, non, ils ne sont pas transformés en savons mais sont devenus des marchandises plus ou moins rentables. L'ensemble du système fonctionne sur un rapport de rentabilité comme les camps. C'est là l'inconscient de notre monde. Cette industrialisation de la mort est un point de non-retour sur lequel s'est greffé l'industrialisation de la vie. A Auschwitz ils ont fabriqué des cadavres, ils ont supprimé la vie dans la mort, si bien qu'aujourd'hui c'est la mort elle-même qui est niée dans la vie et en même temps qu'elle est la vie dans la vie. C'est pourtant clair. A Auschwitz ils ont organisé, ils ont organisé le meurtre du langage et maintenant nous subissons le bruit assourdissant de la communication planétaire qui tend à nous faire oublier ce meurtre. Les mots ne portent plus leur sens. Les individus ne se parlent plus parce que le sens des mots a été contaminé à Auschwitz. Ce qui avait tenu de valeur aux individus jusqu'à Auschwitz a été anéanti là-bas.
– Ce n'est pas vrai Samuel, ce n'est pas vrai.
– Tu ne veux pas l'entendre (Hortense), personne ne veut l'entendre. Les hommes aujourd'hui ne supportent plus d'appartenir à cette espèce qui n'a pas su empêcher Auschwitz. Ils veulent se débarrasser de l'humain, de l'humain dans l'espèce humaine. Ils ne savent plus ce qu'être un homme signifie.
Extrait
de Horsita (roman?) de Lorette Nobécourt*,
publié en 1999. Il y a donc treize ans de cela, ce pourrait tout
aussi bien être 2009 ou 2012, aussi sans doute 2019.
Lire et relire,
antidote de la pauvreté d'une campagne présidentielle où l'on
voudrait (tant) qu'elle soit exaltante, profonde, bouleversante, au
sens des idées qui bouleversent, visionnaire oui, que l'on confond
improprement avec prospective – que sait-on de l'avenir pour en
prédire les arcanes (devrais-je plutôt parler de lames), lui qui
pour se jouer de nos vanités déploie et replie constamment son
œuvre, il ne nous attend pas, il est déjà là, avant nous. Je
voudrais tant qu'il y ait ces emportements utopiques, I want a
dream. Mais, la crise la crise la crise, bref le vide sidéral de
la réflexion au profit de la réactivité brownienne : Prem !
C'est à qui dégainera le premier, défouraillera. Alors, dans ces
temps de frustration intense – pour moi seulement, je ne veux gêner
personne, pour moi seul bien entendu amoureux impénitent de la
Politique comme résolution (diurne) de mes rêves (nocturnes), pour
moi seul qui irai voter quoi qu'il en soit et qu'ils en soient, ne
serait-ce que parce que si on me l'interdisait je me battrai à sang
et à mort pour pouvoir en user de ce pouvoir là –, je lis
beaucoup ces jours, découvrant dans les pensées coulées de l'encre
heureusement sèche à nos regards avides et assoiffés, d'infinis
horizons dans lesquels je ne cesse de (re)découvrir la simple Évidence : tout est lié et Relié, à la fois dans le temps et
l'espace, avant, là et après, tout ici et tout là-bas, les interconnections humaines (pour ne s'en tenir qu'à cette dimension) innombrables ont de quoi
rassasier les appétits les plus exigeants. Et si les « grandes
questions » ne sont pas si nombreuses, elles
extendent néanmoins leur champ illimité. Nous y fondre redonne
espoir, rien n'est donc perdu définitivement. Mais si mais si.
Ayant déjà abordé ici ce sujet du choix électoral, j 'ajoute pour être tout à fait clair et au besoin transparent, que je vais
voter François Hollande, finalement dès le premier tour.
Pourtant... pas vraiment sexy, ni fulgurant, assurément ! Loin
des vastes horizons, sans doute ! Pragmatique et raisonnable,
trop certainement ! Mais qui s'interroge politiquement,
c'est manifeste selon ma perception, sur « savoir ce qu'être
un homme signifie » au XXI° siècle de notre ère humanoïde
végétalisée. Instrumentalisée, si l'on préfère. Se réapproprier
l'humain en nous, tâche individuelle d'abord, mais collective
nécessairement et vitalement. L'individu ne représente-t-il pas à ses yeux "la puissance d'un collectif déployé". Hollande parle d'égalité comme socle
et de justice comme référent premier. Or il peut les mettre en œuvre. C'est, ce sera toute la gravité de sa responsabilité. Car les
comptes sont toujours faits, en définitive. Comme je dis souvent
(répète, disent nos enfants) : ni châtiment, ni récompense,
que des conséquences. On est loin des envolées lyriques... voilà
bien pourtant une «posture» digne et équanime pour
notre vieux pays. En l'occurrence
et compte tenu de ce qui Est, ce serait déjà oui, révolutionnaire, au sens abouti de révolution. R-évolution. Rien que pour cela, ce qui implique pour tout
cela, il aura ma voix et compte déjà mon soutien.
Dernier ouvrage
paru (2011) «Grâce leur soit rendue», suite à la
publication duquel l'auteur franchit finalement l'Arche de Roberto Bolaño à Blanès, au
couchant.
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