6.2.12

Horizontal. Non, mieux, latéral.

Je dois battre ma coulpe. Tant et tant d'années où j'ai rebattu les oreilles de mes proches, ma plus proche en particulier dans les années 90, sur l'évolution immanquable de nos sociétés de la verticalité (institutionnelle notamment) à l'horizontalité. J'en ai même fait le centre de mon combat –«si singulier» pour le moins, estimeront nombre de mes relations, famille et amis proches, justement– lors de mon engagement politique électoral aux législatives de 1993. Vingt ans déjà! Oui, vingt ans que je rabâche inlassablement cette évidence pour moi, plus intuitive que construite ou réfléchie: c'en est fini des structures pyramidales et centralisées, le monde est désormais conduit à une horizontalité qui va bousculer –qui bouscule déjà même considérablement– nos habitudes et modes de vie. Remettre l'homme au centre du jeu, lui permettre d'accomplir son destin individuel et collectif à la fois local et global.
J'ai puisé dans cette conviction ma force, m'opposant (nécessairement) aux structures en place, empruntant une voie politique étroite qui ne pouvait évidemment mener à l'élection : candidat libre! Autant dire candidat sans avenir. Je ne le regrette pas, malgré les effets dévastateurs collatéraux qui en ont résulté durablement dans ma vie professionnelle et sociale. Disons plus clairement que s'il m'est arrivé, et encore parfois aujourd'hui, d'en regretter certains effets multiplicateurs, je n'en ai jamais remis en cause... la cause précisément. Cette évidence allait entraîner nombre de conséquences, pas seulement au niveau théorique et conceptuel, sur l'appréhension du monde environnant, la place qu'il convient d'y réserver, le rôle que désormais il serait utile de tenir, pour harmoniser la pensée à l'action...
Vaste programme, en cours, jamais achevé. D'où également une impression de flou ou de confusion, d'incertitude. Même, la réalité d'une forme de précarité sociétale. Risque et danger. Pourtant, au fond de mon être se tient toujours cette évidence et donc, corrélativement, que je ne suis pas venu au bon moment. Trop tôt... trop tard... les deux? Mais peu importe, car au fond les signes d'encouragement ne manquent pas. Ils sont comme des petits cailloux placés sur le chemin de l'inconnu, des signaux de reconnaissance.
Par exemple je peux dire, contre toute mode et tendance actuelle (et donc d'autant plus fortement) que j'ai trouvé dans la longue campagne participative de Ségolène Royal en 2006 et 2007 une profonde correspondance avec mes idées, je dirais même plus, mes sentiments profonds. Et très tôt, pratiquement dès le départ, j'ai spontanément associé à sa démarche une pensée comme celle d'Edgard Morin... leur rapprochement ultérieur ne m'a donc nullement surpris (d'ailleurs qu'en est-il aujourd'hui de ce laboratoire régional de la complexité, a-t-il lui aussi été victime des modes et passions passagères?).
Aussi, sans aucun désir de provocation, j'aime à réaffirmer ici et maintenant que cette femme avait –et donc a, quoiqu'il en soit– une « vision de l'évolution ». Et que si Francois Hollande est élu Président de la République, ce que personnellement je souhaite, il serait bien inspiré de saisir cette chance, cette opportunité de prendre à ses côtés dans un espace préservé –en particulier des ravages du temps rapide*– une personne de cette trempe qui a démontré par la parole et par l'action qu'elle comprend les évolutions de notre temps et partant celles nécessaires de notre société.
Je pense à Ségolène Royal en écoutant Jérémy Rifkin**, très bien interrogé à France Inter par Stéphane Paoli hier dimanche. Une petite heure précieuse d'entretien que je recommande vivement à quiconque souhaite percevoir le monde qui est, c'est à dire celui qui se prépare sous nos regards ouverts, faisant ainsi écho à La Fontaine : «À ce signe d'abord leurs yeux se dessillèrent». Une recommandation que j'adresse en particulier à mes relations, famille et amis proches... Et je profite de l'occasion pour substituer à « horizontalité » le terme mieux adapté et complet, plus pertinent, de « latéralité ».

*Je pense par exemple à ce que pourrait être un vaste commissariat général au Plan, revu à la forme XXI° siècle, en tant qu'organe central, durable et intangible

**La troisième révolution industrielle – Comment le pouvoir latéral va transformer l’énergie, l’économie et le monde (éditions Les liens qui libèrent, février 2012)

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