2.1.10

Dis papa, ça sent quoi finalement ?

J'ai surmonté mon appréhension d'égoûtée en visitant le site officiel du Ministère du Relent National pour tenter de comprendre la justification officielle du lancement public d'un débat sur l'identité nationale française. Ce n'est pas que le sujet ne m'intéresse pas... c'est que le débat, tel qu'initié, me fait peur. Il me fout la trouille, oui, pour tout dire. Et pour un avenir (prochain) qui s'annonce bien sombre... brun ? Ce qui m'a poussé à le faire - me décider à franchir le cap d'une salubre auto protection que je me suis fixé dès l'amorce - c'est en fait Jean Daniel.
L'éditorialiste du Nouvel Observateur constitue, pour moi, au travers ses écrits et prises de position (courageux, de portée universelle, mesurés et souvent singuliers) une référence absolue et quasi incontournable depuis trente ans au moins. Or, le fondateur du Nouvel Observateur a accueilli favorablement l'initiative d'un tel débat, arguant ne serait-ce que parce que ce sujet est largement traité dans les colonnes de l'hebdomadaire (avec courage, etc) depuis fort longtemps et que cette question est centrale, etc etc...*. J'en ai été profondément troublé, je le suis encore. D'où cet article, deux mois jour pour jour après le lancement officiel du "débat". Sur le fond, je comprends parfaitement la position de Jean Daniel - d'ailleurs également celle de Jacques Julliard - mais dans la forme, je ne parviens pas à détacher le sujet de l'objet, et surtout, à en écarter son intention. Pour moi, c'est exactement comme la différence entre homicide volontaire et homicide involontaire : mort avec ou sans intention de la donner ! Ici, c'est avec, incontestablement.
Face à cette marée qui flatte les bas instincts, tout ce qui chez l'homme (je m'inclue) appelle à l'exclusion, au rejet, à la méfiance, à la défiance, je crois qu'il est IMPOSSIBLE de résister à la vague de déchets fétides qui déferle de tous nos ventres repus et satisfaits. Je simplifie, bien sûr, Nord-Sud. Je cite ici, inexactement sans doute mais à point nommé, le proverbe arabe : “On n'arrête pas la mer avec les mains”. Non, je ne crois pas (plus) personnellement qu'il soit possible de "débattre" avec LE PEN. Voilà, cela résume exactement ce que je pense à ce sujet. Ou alors, à la façon TAPIE : on cogne, OK ! Mais qu'est-ce que ca change vraiment finalement, dans les têtes ? Résultat nul, ne reste que le spectacle, panem et circenses. Donc, prétendre "débattre", c'est déjà accorder à la marée le pouvoir de nous recouvrir. Perdu d'avance. Certes, ne m'a pas échappé la subtilité -que j'espère, aussi, Efficace- consistant pour l'hebdomadaire à défendre bec et ongles les valeurs républicaines à longueur de colonnes, avec des arguments cinglants, référents, également prestigieux ou anonymes. Cependant, je n'y crois pas. Ce sale combat est effectivement perdu d'avance. J'espère me tromper, mais franchement, cela m'effraie : cette périlleuse conjonction de nationalisme, de peur de l'autre, de crise économique et sociale, sur fond de certitudes sommaires balancées en plein jour. L'écluse a été ouverte, un niveau recouvre l'autre, c'est imparable. Merci à l'éclusier!
Donc, réellement troublé, j'ai surmonté et ouvert le site officiel... J'y ai trouvé dans son tout premier intitulé : "Les objectifs du grand débat sur l’identité nationale". Aussi, hélas, la confirmation alarmante et flagrante de ce que je pense et crains (oui, cher Jean Daniel, ce débat est "malsain") à travers la simple lecture des trois premières lignes ministérielles :
1ère ligne : "Eric BESSON, Ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire a ouvert lundi 2 novembre 2009 un grand débat sur l’identité nationale."
2ème ligne : "L’organisation de ce débat constitue l’un des engagements souscrit par le Président de la République lors de la campagne présidentielle, repris dans la lettre de mission qu’il a adressée, avec le Premier Ministre, à Eric BESSON, le 31 mars 2009."
3ème ligne (de fait, la première ligne sur l'objectif du débat): "Ce débat répond aux préoccupations soulevées par la résurgence de certains communautarismes, dont l’affaire de la Burqa est l’une des illustrations (…)."
Faire un lien entre Identité Nationale et Immigration est (donc vraiment) faire du mauvais esprit (!) détourner la sincérité et la spontanéité avec laquelle a été propulsé le mercenaire préféré pour "valoriser" ce grand thème fédérateur (!) pour "aider" nos compatriotes à "clarifier" leur sentiment (!) de comment être français en 2010 (!) Que du mauvais esprit (français) donc, à y voir un outil particulièrement nauséabond visant à accroître les tensions inter-raciales-ethniques-et-communautaires ...
Ce sera jugé un peu sommaire mais tant pis, parfois il est bon d'appeler un chat un chat, l'intention qui préside à ce débat est de foutre la merde. Et cela ne sent pas bon, mais pas bon du tout !

*je renvoie au site du Nouvel Observateur fort bien fait et très complet

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